Communiqué – Studios Occitanie-Méditerranée : un projet fumeux aux conséquences environnementales graves

Au sud-est de Béziers, sur le domaine de Bayssan, un gigantesque projet de parc d’attraction privé autour du cinéma se profile à l’horizon. A terme ce sont 60 ha de terres agricoles et de milieux naturels qui seraient artificialisés pour accueillir 2 millions de visiteurs par an. FNE LR alerte sur l’impact environnemental de ce projet et condamne le dévoiement de la procédure de concertation en cours.

Une concertation impossible sur un projet aux conséquences environnementales cachées

La concertation a débuté le 7 septembre sous l’égide de la Commission Nationale du Débat Public (CNDP). Depuis le début, le promoteur du projet, M. Granja, promet monts et merveilles. Son projet de parc d’attraction autour du cinéma et de studios de tournage doit attirer les majors de l’industrie du cinéma américain et créer des milliers d’emplois. Si le projet reste très flou, et si M. Granja refuse de dire quelles sont ces « grandes majors » qui vont venir financer son idée, la concertation engagée depuis deux mois est surtout l’occasion d’un show bien orchestré par une équipe de communicants chargés de vendre le rêve.

Mais selon le Code de l’Environnement, une concertation publique n’est pas une campagne publicitaire à la gloire d’un projet, c’est une procédure qui doit permettre au public de débattre des impacts significatifs du projet sur l’environnement. Or, depuis deux mois, tous les efforts sont faits pour cacher au public les conséquences environnementales graves de ce projet de « Hollywood lès Béziers », qui va impacter une biodiversité protégée, détruire 60 hectares de bonnes terres agricoles et consommer la précieuse ressource en eau pour accueillir 2 millions de personnes par an.

Face au comportement du maître d’ouvrage, qui cherche à empêcher toute possibilité de discussion sur les aspects gênants de son projet, la CNDP vient de décider de prolonger la concertation de 15 jours, à notre demande (lire le courrier de Mme Jouanno).

A bon entendeur, la concertation aura donc lieu jusqu’au 14 novembre à minuit. Vous pouvez encore contribuer sur internet : https://www.registre-numerique.fr/projet-complexeIMC-domaineBayssan/deposer-son-observation 

Mais alors que sait-on des impacts sur l’environnement ?

Face au manque de transparence du porteur du projet, FNE LR a obtenu un certain nombre de documents qui auraient dû être transmis au public depuis le début de la concertation. En voici un résumé :

Des impacts forts sur la biodiversité

En passant par la Présidente de la CNDP, Chantal Jouanno, FNE a pu obtenir de l’aménageur la communication tardive d’un diagnostic préliminaire sur les enjeux faune et flore réalisé en 2017. Les impacts estimés du projet sur la biodiversité sont qualifiés de fort. Nous soulignons que depuis ce pré-diagnostic, il y a trois ans, le maître d’ouvrage a réalisé des inventaires complémentaires via le bureau d’études CAPSE, qu’il refuse toujours de présenter au public.

En attendant d’en savoir plus, on peut constater que le projet va porter atteinte à un certain nombre d’espèces menacées et protégées comme le magnifique Rollier d’Europe.

La difficulté d’alimenter le projet en eau

Depuis le début de la concertation, l’alimentation en eau du futur parc d’attraction est un sujet sur lequel M. Granja et « ses équipes » entretiennent le plus grand flou. Le secrétaire général de la préfecture de l’Hérault écrit pourtant dans le certificat de projet sollicité par M. Granja : « malgré notre demande de complément le pétitionnaire n’a pas fourni l’estimation des besoins en eau potable et en eau brute de son projet. La solution technique présentée pour l’eau potable (création d’une station de potabilisation sous maîtrise d’ouvrage propre à partir de l’eau brute de la prise d’eau BRL de Réals) appelle de fortes réserves quand à sa faisabilité technique et réglementaire ».1

Là encore, ce document que FNE LR publie n’a curieusement pas été présenté au public dans le cadre de la concertation. Compte-tenu de l’impossibilité de la solution envisagée, et alors qu’on ne connaît toujours pas les volumes d’eau nécessaires au projet (!), il semblerait que M. Granja ait obtenu de M. Ménard que l’alimentation en eau de son projet soit assurée par la Communauté d’agglomération de Béziers Méditerranée. Quoi qu’il en soit, le choix stratégique d’affecter de l’eau (en quantité inconnue) au projet de M. Granja plutôt qu’à l’alimentation en eau potable des populations existantes ou à l’irrigation agricole n’a donc jamais pu être discuté dans le cadre de la concertation publique.

Pour FNE LR, dans un contexte de changement climatique, de tels projets ne sont pas prioritaires comparé à d’autres usages. Dans tous les cas, il est inacceptable qu’un tel débat soit rendu impossible par la rétention d’informations essentielles.

L’artificialisation excessive des espaces naturels et agricoles

Là encore, selon M. Granja, il n’y a aucun problème. Mais la réalité de ce territoire est qu’une consommation excessive d’espace naturel et agricole est insoutenable à long terme. Le PLU de Béziers en cours de révision et soumis à enquête publique fait d’ailleurs l’objet de vives critique de l’Autorité Environnementale sur ce point. Après avoir noté que la consommation d’espace associée au projet de Studios Occitanie-Méditerranée n’est pas comptabilisée, elle indique que l’augmentation de la consommation d’espace prévue par le PLU « est en contradiction avec l’objectif de réduction de la consommation passée contenu dans le PADD, ainsi qu’avec l’objectif du SCoT de réduire de 50% le rythme d’artificialisation d’espace ».

Alors que M. Ménard ne trouve pas utile de répondre à l’Autorité Environnementale à ce sujet, le projet de M. Granja apparaît complètement incompatible avec l’objectif majeur de la région Occitanie de viser le «zéro artificialisation nette» à l’horizon 2040, avec le SCOT en vigueur et, enfin, avec le PLU de Béziers ! 2

Ces informations, comme les motifs de la décision de la CNDP de prolonger le débat de 15 jours, ont été dissimulées sciemment au public. Nous n’avons malheureusement pas pu en parler lors de la dernière réunion publique mardi 27 octobre, où de manière inacceptable toute intervention du public a été interdite par l’animateur ! C’est pourquoi nous n’avons d’autre choix que de nous exprimer par ce communiqué.

« Il est fréquent que les aménageurs s’imaginent qu’une concertation est une occasion de faire une campagne marketing pour lancer leur projet, mais faire de la rétention d’information et vouloir museler le débat est une attitude qui se révèle toujours très contre-productive. Certains porteurs de projets ont du mal à cacher le mépris qu’ils éprouvent pour le public qui se tient en face d’eux, et n’ont bien souvent aucune culture de la démocratie, qui implique d’être transparent et de se soumettre à la critique du public. Ce n’est pas en nous empêchant de parler qu’il sera possible de sauver des projets aussi anachroniques, s’ils ne répondent pas aux contraintes environnementales nouvelles, qui nous imposent de penser à un avenir fait de sobriété. Saurons-nous relever le défi d’être heureux sans un nouveau parc d’attraction à la noix ? J’en suis convaincu et je me réjouis de lutter pour la préservation de notre capital naturel et agricole. Il est regrettable que le département de l’Hérault et la ville de Béziers, qui possèdent le domaine, soient main dans la main quand il s’agit de brader ce capital. »

Simon Popy

président de France Nature Environnement Languedoc-Roussillon

 

Lire en ce sens les pages 4 et 7 du certificat de projet

Lire en ce sens les pages 9 et 10 de l’avis de la l’Autorité environnementale

Simon Popy

Président de FNE OCMED