Gare nouvelle de Montpellier-La-Mogère : lettre ouverte
A L’ATTENTION DE :
M. le Préfet de la Région Languedoc Roussillon, Pierre de BOUSQUET
M. le Président de la Région Languedoc Roussillon, Damien ALARY
M. le Président de l’Agglomération de Montpellier, Philippe SAUREL
Monsieur le Préfet, Messieurs les Présidents,
Le Commissaire enquêteur chargé de mener l’enquête publique sur le projet de Gare nouvelle à Montpellier la Mogère a récemment rendu un avis favorable sans aucune réserve. Ce projet a pourtant fait l’objet de nombreuses interrogations, de graves alertes et de propositions alternatives depuis plusieurs années et ré-exprimées largement au cours de cette enquête publique.
Ce constat met une nouvelle fois en lumière, de manière plus qu’inquiétante, le décalage croissant qui existe entre des décisions prises par des pouvoirs publics locaux, souvent bien en amont des procédures légales de concertation, sur des projets de territoire aux impacts environnementaux et aux gains socioéconomiques plus que contestables, et les conditions de participation du public à ces prises de décisions.
Les procédures légales peuvent donner l’impression d’avoir été respectées. Mais tout semble ficelé bien avant l’ouverture des enquêtes publiques auxquelles nous ne comprenons dès lors plus l’utilité de contribuer. Nombreux projets sont saucissonnés et présentés au public dans des calendriers différents, avec des études d’impact parfois bâclées, à l’objectivité contestable, et ne prenant quasiment jamais en compte les impacts cumulés de projets séparés qui sont pourtant intimement liés. C’est clairement le cas ici avec ce projet de gare nouvelle fonctionnellement lié au projet de Quartier Oz. Pas de gare sans nouveau quartier mais pas de nouveau quartier sans gare ? Peut-on sérieusement penser un projet de territoire de cette façon ?
C’est un sentiment amer d’inutilité qui envahit aujourd’hui notre fédération régionale et ses associations pourtant résolument engagées dans le dialogue environnemental. La démocratie est un combat de tous les jours qui ne s’arrête pas une fois les urnes du suffrage universel closes. Et il appartient aux pouvoirs publics locaux de garantir les bonnes conditions d’exercice de cette démocratie, dont les associations de protection de la nature et de l’environnement sont des acteurs de taille.
Les alertes de notre Fédération régionale, notamment sur les incompatibilités de ce projet avec les prescriptions du Plan de Prévention des Risques Inondations de Montpellier, reprenant d’ ailleurs largement les analyses de l’Autorité Environnementale, n’ont entrainé aucune réponse sérieuse suite à l’enquête publique. Nous serons dès lors plus que vigilants sur les conditions de délivrance des prochaines autorisations Loi sur l’eau. Tout comme nous restons plus qu’interrogatifs sur la manière dont sera justifiée auprès de nos concitoyens – voire auprès du Juge si cela s’avérait nécessaire – une autorisation de construire qui mettrait directement en cause la sécurité des biens et des personnes.
En outre, dans une Région qui est loin d’être épargnée par le chômage et la pauvreté, avec des taux bien supérieurs à la moyenne nationale, les fonds publics, de plus en plus rares, mériteraient sans doute de ne pas être gaspillés au profit d’un projet inutile, et qui plus est porteur d’une conception archaïque de notre politique d’aménagement du territoire, notamment en matière de transports.
En effet, le Languedoc Roussillon, très vulnérable aux effets du changement climatique, a besoin de promouvoir avec force le fret ferroviaire régional afin de réduire sérieusement les émissions de gaz à effet de serre liées au trafic des marchandises par la route. La course aux équipements en gare nouvelle, aujourd’hui à Montpellier et demain à Béziers, Narbonne et Perpignan, accompagnée d’une volonté de privilégier la très grande vitesse voyageur sur la future Ligne Nouvelle Montpellier Perpignan mettent clairement en péril cette nécessaire transition du fret tout routier vers le rail.
Pour conclure, vous pouvez compter sur notre entière mobilisation jusqu’au bout des procédures légales visant l’autorisation de ce projet de gare. Nous sommes persuadés qu’il est encore possible d’ouvrir la voie aux alternatives crédibles et largement moins couteuses et de rouvrir le nécessaire dialogue sur la politique régionale en matière d’aménagement du territoire et d’infrastructure de transport.
Persuadée que vous serez attentifs à cette interpellation, Monsieur le Préfet, Messieurs les Présidents, nous sommes à votre entière disposition pour échanger plus en détail sur nos alertes et propositions.
Céline Mesquida,
Présidente FNE Languedoc Roussillon