Communiqué : nouvelle condamnation pénale d’un exploitant d’éoliennes pour destruction d’espèces protégées
Le Tribunal correctionnel de Montpellier a condamné la société ÉNERGIE RENOUVELABLE DU LANGUEDOC (ERL) et son représentant légal François DAUMARD pour avoir causé la mort d’un Aigle royal dans le cadre de l’exploitation des éoliennes dites de Bernagues, sur la commune de Lunas, dans le massif de l’Escandorgue.
L’impact sur l’Aigle royal minimisé a priori
Le 24 avril 2013, le Préfet de l’Hérault délivrait à la société ERL un permis de construire pour l’édification de 7 éoliennes sur le territoire de la commune de Lunas au lieu-dit “Bernagues”. Le 26 janvier 2017, la Cour administrative d’appel de Marseille annulait ce permis de construire car la société ERL avait minimisé l’impact de son projet sur le couple d’Aigles royaux dont la nidification avait été constatée à proximité immédiate.(1)
Des destructions d’espèces protégées répétées
Selon les constats de la société ERL, les éoliennes de Bernagues sont régulièrement à l’origine de destructions d’oiseaux et de chauves-souris protégés. Entre 2017 et 2021, pas moins de 50 spécimens ont été retrouvés morts au pied des éoliennes. En 2020, fait exceptionnel, c’est une aile de Vautour moine, espèce particulièrement menacée et rare, qui était retrouvée sous une éolienne. Enfin, le 16 janvier 2023, le mâle du couple d’Aigles royaux de l’Escandorgue rentrait mortellement en collision avec les éoliennes (2). FNE OCMED portait plainte.
Une société qui refuse de respecter le droit qui protège la faune sauvage
Alors que la société ERL était consciente de l’impact négatif de ses éoliennes sur la faune protégée, et en particulier, du risque de collision affectant le couple d’Aigles royaux nichant à proximité, celle-ci a poursuivi l’exploitation de ses éoliennes, sans solliciter une dérogation pour la destruction d’espèces protégées.
Le délibéré
Le tribunal correctionnel a condamné en date du 9 avril 2025 :
1) au titre de l’action publique :
◦ la société Énergie Renouvelable du Languedoc (ERL) à 200 000 euros d’amende dont 100 000 euros avec sursis,
◦ M. DAUMARD François, représentant légal de la société ERL, à 40 000 euros d’amende dont 20 000 avec sursis,
◦ la société ERL à la suspension de l’exploitation des éoliennes de Bernagues pendant un an, avec exécution provisoire,
◦ la société ERL à la publication d’un communiqué judiciaire dans les médias : Le Monde, Reporterre et Midi Libre,
2) au titre de l’action civile :
◦ 6 000 euros de dommages et intérêts à titre de réparation du préjudice moral de FNE OCMED et 1 000 euros au titre des frais de justice
◦ 6 000 euros de dommages et intérêts à titre de réparation du préjudice moral de l’ASSOCIATION pour la protection des animaux sauvages (ASPAS) et 1 000 euros au titre des frais de justice
◦ 6 000 euros de dommages et intérêts à titre de réparation du préjudice moral de l’association SITES ET MONUMENTS et 1 000 euros au titre des frais de justice
◦ 6 000 euros de dommages et intérêts à titre de réparation du préjudice moral de l’association VIGILANCE PATRIMOINE PAYSAGER ET NATUREL et 1 000 euros au titre des frais de justice
◦ 6 000 euros de dommages et intérêts à titre de réparation du préjudice moral de l’association PROTECTION DES PAYSAGES ET RESSOURCES DE L’ESCANDORGUE ET DU LODEVOIS et 1 000 euros au titre des frais de justice
◦ 5 000 euros de dommages et intérêts à titre de réparation du préjudice moral de l’association Ligue pour la Protection des Oiseaux (LPO), 3 000 euros au titre de la réparation du préjudice écologique et 1 000 euros au titre des frais de justice.
Produire de l’énergie renouvelable est nécessaire, mais cela ne devrait pas se faire au détriment de la biodiversité. Depuis 10 ans nous alertons sur le risque que ce parc fait peser sur le couple d’Aigles royaux de l’Escandorgue nichant a proximité immédiate. Mais jusqu’ici, le risque pour les aigles et le droit des espèces protégées n’ont jamais fait le poids face à la volonté de rentabiliser un investissement industriel déjà réalisé à la hâte sur la base d’études complaisantes.
Si elle ne ressuscitera pas l’aigle de l’Escandorgue, j’espère que cette condamnation pénale sonnera comme un nouveau coup de semonce auprès de la filière éolienne. Elle rappelle l’importance (et l’obligation) pour les porteurs de projets d’évaluer sincèrement leurs conséquences environnementales en amont, et d’obtenir les autorisations adéquates. Nous n’acceptons plus que la transition énergétique serve de prétexte pour ruiner les efforts de conservation de la biodiversité.
(1) Suite à l’annulation de ce permis de construire une demande de démolition des éoliennes a été engagée par plusieurs associations locales. A ce jour, la cour d’appel de Nîmes a ordonné la démolition des éoliennes. La société ERL ayant saisi la cour de cassation, la décision n’est pas définitive.
(2) à ne pas confondre avec le jeune aigle royal qui avait été tué par le parc voisin, sur la même commune, en 2017 https://fne-ocmed.fr/2017/09/12/collision-mortelle-dun-aigle-royal-avec-une-eolienne-du-plateau-de-lescandorgue-dans-lherault/