1ère réunion de la communauté régionale « Éviter Réduire Compenser » Occitanie (CRERCO)
Le 1er février 2017 – GRUISSAN
Notre président, Simon POPY, a été invité à porter la parole des associations lors de cette réunion. Voici un compte-rendu rapide de ses interventions.
Plénière le matin : rappel des interventions (Programme complet de la journée)
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Ouverture
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Mme LANGEVINE, vice-présidente de région en charge de la transition écologique et énergétique, de la biodiversité, de l’économie circulaire et des déchets
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M. MONARD, directeur régional adjoint de la DREAL Occitanie
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ERC : de quoi parlons-nous, où en sommes nous en France, en Occitanie ?
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Emilie PERRIER, responsable du département biodiversité DREAL Occitanie
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Didier SOUSTELLE, chargé de mission ERC DREAL Occitanie
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Feuille de route Etat-Région, charte de fonctionnement
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Zoé MAHE, directrice de l’écologie DREAL Occitanie
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Stéphane LEROY-THERVILLE, directeur de projet foncier Région Occitanie
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Observer les pratiques et tendre vers leur harmonisation
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Thierry DISCA, directeur d’étude à BIOTOPE
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Question de Simon POPY en plénière :
Une question à Agnès Langevine concernant un problème d’éthique qui remonte de plusieurs de nos associations : va-t-on vers un monde où la création ou le financement des politiques de conservation deviendraient tributaires de destructions occasionnées ailleurs ? (via la compensation). Impossible de ne pas évoquer la Réserve Naturelle Régionale de Sainte Lucie, voisine : sans nier les bienfaits de la création d’une nouvelle réserve naturelle, dont nous nous réjouissons, (1) cette réserve a été créée avec l’objectif affirmé de compenser l’extension du port de Port-la-Nouvelle ; (2) elle est financée en partie par des fonds de compensation. Les avis sont partagés parmi les associations de protection de la nature et de l’environnement sur l’aspect éthique et symbolique de cette initiative, et pour ce motif le Conseil d’Administration de FNE LR a voté contre le classement de la RNR de Ste Lucie dans les projets exemplaires en matière d’aménagement du territoire. Question : peut-on espérer une doctrine régionale plus claire ?
Réponse (résumée) : Agnès Langevine entend le problème qui s’était déjà posé a à l’époque de la création de la RNR, et nous informe qu’elle y avait au final été favorable, étant donné que lesdites mesures compensatoires étaient soumise à la condition d’additionnalité par rapport à la gestion prévue de la réserve, sans ces mesures. Il ne faut pas attendre une doctrine sur le sujet venant de la région. La discussion éventuelle sur ce sujet pourrait trouver sa place au sein de l’ARB.
Ateliers l’après-midi :
(1) « méthodologies »
(2) planification et enjeux fonciers
(3) la compensation par l’offre / la demande
Intervention Simon POPY – introduction de l’atelier 3 « La compensation par l’offre / la demande »
Bonjour, tout d’abord pour celles et ceux qui ne nous connaissent pas, FNE LR est une fédération d’associations de protection de la Nature et de l’Environnement qui rassemble une cinquantaine d’associations soit environ 6000 personnes.
Personnellement je n’ai pas choisi le titre de cet atelier et comme il vient de l’être rappelé à l’instant bien qu’il ne parle que de compensation il ne faut pas oublier Eviter et Réduire. Ce qui tombe bien car nos associations ne sont pas d’accord pour envisager la compensation en dehors de la séquence. C’est pourquoi je vais me permettre de déborder un peu du cadre imposé et vous parler d’évitement en essayant d’aller au-delà du simple vœux pieux.
Mais avant je voudrais préciser qu’un de nos objectifs est d’amener les associations à agir plus en amont dans le processus d’aménagement du territoire. C’est pourquoi nous organisons des formations sur les documents d’urbanisme, et parmi les questions qui découlent de nos réflexions l’une est de savoir comment anticiper la séquence ERC au stade du PLU ou du SCOT. Je précise que pour nous ANTICIPER c’est une possibilité de mieux appréhender les effets cumulés, et la possibilité de réintroduire la notion de limite, spatiale, foncière, écologique, dans le débat avec un regard sur le long terme.
Plus spécifiquement sur ERC nous avons organisé une table-ronde récemment ce qui nous a permis de voir les réactions des associations face à un panel d’intervenants. Ce que nous en avons retenu :
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une diversité de points de vue sur la compensation : du rejet à l’accompagnement
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un consensus sur la perfectibilité de la compensation, et ses nombreuses lacunes/défauts ; pour une association de protection de la nature la vraie équivalence en compensation c’est le dé-bétonnage ou la dés-artificialisation, tout le reste est sujet à débat (on pourrait parler de compensation « relative »); [Atelier 1]
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un consensus sur le risque de déséquilibre dans l’aménagement du territoire, et l’attention qui doit être portée à la spéculation et la concurrence foncière (notamment agricole) [Atelier 2]
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unanimité également sur le besoin prioritaire de mieux travailler sur le E de la séquence (ainsi que le R) : il nous semble qu’il y a beaucoup de marge de manoeuvre et qu’avant d’ouvrir grand les vannes à la compensation il faut revenir à la base légale qui encadre les projets et autorise les Mesures Compensatoires.
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cf. E de la séquence ERC dans le droit de l’évaluation environnementale (Etude d’Impact Environnemental)
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cf. E de la séquence ERC et E de la Raison Impérative d’Intérêt Public Majeur dans le droit des espèces protégées (dérogation)
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Au titre de l’évitement 3 choses nous apparaissent déterminantes :
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la capacité à mettre en balance plusieurs scénarios réellement étudiés avant de décider la réalisation d’un projet, pour prouver l’absence d’alternative possible ;
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au minimum le plus important est exigé : le scénario sans projet ;
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contre-exemple : gare de Manduel (Nîmes) : l’Autorité Environnementale a soulevé que le scénario sans projet n’était pas étudié (alors qu’il y a des espèces protégées et de la compensation) ; on ne se pose donc même pas la question de savoir quelles seraient les conséquences d’une absence de gare sur l’environnement, qui inclut le milieu naturel mais aussi les conséquences en termes de trafic ferroviaire et les aspects socio-économiques.
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L’étude d’impact doit être en mesure de démontrer que les impacts résiduels sont vraiment compensés ; à ce titre la boite noire du calcul des unités de compensation ne le facilite pas
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dans le cas d’une dérogation pour la destruction d’espèces protégées la Raison Impérative d’Intérêt Public Majeur de nature ECONOMIQUE est souvent avancée mais il manque une doctrine plus claire pour sa démonstration
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la jurisprudence montre qu’il ne suffit pas de l’affirmer sans analyse FINE (1) de l’absence d’alternative et (2) de l’absence d’atteinte à l’état des espèces concernées,
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seule cette analyse fine permet au juge d’apprécier les caractères IMPERATIF et MAJEUR qui renforcent doublement la notion d’Intérêt Publique.
La pratique actuelle laissant fortement à désirer : avant de vouloir plus ou moins bien compenser par l’offre ou par tout autre système il nous semble qu’il faut se donner les moyens de remettre en cause un certain nombre de projets dont la pertinence n’est pas démontrée. C’est le sens d’une partie de notre action que je qualifierais « d’action d’urgence ».
Mais cette forme d’action n’est pas suffisante c’est pourquoi nos associations souhaitent avoir leur mot à dire dans la stratégie qui va se mettre en place à l’échelle de la région ;
Enfin, j’en arrive à la compensation par l’offre :
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je ne vous ferai pas de retour de nos associations sur des exemples, le seul que nous connaissions étant Caussure mais je considère que ce n’est pas un bon exemple, car expérimental
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globalement le mouvement émet de fortes réserves sur la compensation par l’offre dans l’état actuel des choses
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nous craignons en particulier un effet encore plus négatif sur l’évitement ; les premiers retours de l’étranger tendent à montrer que plus la compensation est anticipée et planifiée par les aménageurs, plus l’évitement est facilement oublié. Nous craignons l’émergence d’un supermarché du droit à détruire.
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la compensation par l’offre ne peut être acceptable que s’il y a des garanties que le minimum légal, voire plus, a réellement été fait en amont en matière d’évitement.
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les associations soulèvent également des questions sur le niveau d’exigence en termes de durée, de multiplication des méthodologies douteuses [atelier 1], d’équivalences précises, de type d’opérateur public/privé, d’évaluation…
Au sujet de l’évaluation : le système des unités de compensation est un système adapté au marché donc il simplifie et mutualise. Nous y voyons le risque de perdre de vue l’objectif initial de la Mesure Compensatoire (traçabilité ?) et pensons que ce système rend encore plus difficile le contrôle et l’évaluation de la qualité de la Mesure Compensatoire (entre autres par un juge).
Merci de votre attention