Lettre ouverte à la Région Occitanie : relance ou transformation de l’économie ?
Le 16 juillet 2020 sera soumis au Conseil Régional l’acte 1 d’un large plan de transformation et de développement, un « GREEN NEW DEAL » pour l’Occitanie, en même temps qu’un Plan de relance pour l’emploi. L’occasion d’interroger la cohérence entre ces plans et leur compatibilité avec la transition écologique.
France Nature Environnement Midi-Pyrénées et Languedoc-Roussillon adressent une lettre ouverte à la présidente de Région et aux conseillers régionaux, pour que ces plans soient à la hauteur des enjeux de transformation nécessaires, pour un monde d’après plus juste et plus écologique.
Sortir des logiques de l’ancien monde
La relance économique va reposer en grande partie sur les régions via leurs compétences propres pour le soutien aux entreprises, et l’allocation des fonds européens.
Le plan de relance de la région Occitanie, malgré quelques touches vertes, ne remet pas clairement en question le modèle de société consumériste et carboné. Alors qu’il devrait amorcer la grande transformation de notre économie, il propose de mettre sous perfusion certaines filières comme l’aérospatiale, l’aéronautique, ou la construction automobile, cautionnant la poursuite de ces activités à l’identique, sur la base de vagues promesses d’améliorations à l’horizon de plusieurs décennies.
Pour nos fédérations le plan de relance régional devrait au contraire être un levier pour amorcer immédiatement la mutation vers un modèle radicalement plus sobre, et à faible empreinte écologique.
La relance économique peut être sobre et pourvoyeuse d’emplois
Selon les estimations d’ONG un plan de relance axé sur la transition écologique permettrait de soutenir plus d’un million d’emplois d’ici à 2022 au niveau national (rénovation énergétique, transports, agriculture et alimentation…). Des chiffres cohérents avec l’évaluation des impacts socio-économiques du scénario RÉPOS (Région à Energie Positive), estimant qu’en 2050, le solde entre créations et destructions d’emplois générées par la transition énergétique en Occitanie serait de +90 000 emplois, majoritairement dans le secteur des services. La transition devrait donc être au cœur du dispositif de relance.
Relance et « Green New Deal » doivent présenter un haut niveau d’exigence écologique
C’est pourquoi nous recommandons :
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l’éco-conditionnalité des aides et le reporting contraignant des efforts pour décarboner les activités économiques
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de privilégier le soutien des filières s’engageant dans la transition écologique
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de placer la sobriété comme une priorité au même titre que le développement des énergies renouvelables
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de mesurer les effets de la relance et de la transformation en se référent à d’autres indicateurs que le PIB : réduction d’émissions de GES, indicateur d’épanouissement humain…
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d’assurer une véritable participation citoyenne et de rendre impératives les recommandations de la future Convention Citoyenne d’Occitanie.
« Toute transformation de l’économie pose des questions sociales qui ne sauraient être mises de côté. Mais la transformation de nos économies est une urgence vitale. Il n’y a pas d’emplois dans un monde qui s’effondre écologiquement.
Pour réduire au maximum les conséquences sociales de ces mutations, il est indispensable que nos dirigeants anticipent, favorisent et orientent les reconversions. A l’inverse ils doivent cesser de dilapider les fonds publics pour maintenir artificiellement des activités non durables, ou pour inciter les jeunes à aller vers des filières dont l’avenir est compromis.
S’il faut un plan de relance à court terme, il doit être sobre, orienté vers les besoins réels et prioritaires de la population. Un tel plan doit organiser la transition écologique, et non la poursuite du productivisme. Investir l’argent public dans les ports de plaisance ou dans l’aérospatiale, est-ce vraiment la priorité devant l’abîme de la crise environnementale planétaire ? Alors qu’il resterait six mois aux États pour inverser la courbe des émissions de CO2, bon nombre de décideurs, experts en écologie rhétorique, sont bien timorés en cette période.
Le plan de relance devrait être un tremplin pour la transformation de notre économie régionale vers une économie plus sobre, et non un moyen de repousser le problème à plus tard. Car plus tard, c’est trop tard. C’est une occasion historique et il ne suffit pas de mettre les mots « vert » ou « écologique » à toutes les sauces, encore faut-il qu’une orientation politique forte soit donnée et maintenue y compris quand la situation se dégrade. Mesdames et Messieurs les conseillers régionaux, faites que la relance soit sobre et que le « Green New Deal » ne devienne pas un « new green-washing » ! »