Communiqué : La biodiversité régulièrement dégradée dans les sites Natura 2000 du Languedoc-Roussillon

Depuis un peu plus de trois ans, le projet « Sentinelles de la nature » nous a permis d’identifier et publier 121 atteintes à l’environnement dans les sites Natura 2000 des 5 départements de l’ex-Languedoc-Roussillon – soit environ 20 % des atteintes identifiées sur l’ensemble de ce territoire. Ces chiffres inquiétants témoignent de la pression constante que subissent ces zones désignées pour protéger une biodiversité exceptionnelle et fragile. Alors que le premier congrès national des élus Natura 2000 se tiendra dans les Pyrénées-Orientales, du 28 au 30 septembre prochain, « pour célébrer les 30 ans du réseau Natura 2000 et réfléchir aux nouveaux défis à relever », FNE LR appelle à la mise en place de véritables contrôles des activités humaines sur ces sites et s’inquiète du manque de moyens affectés à leur gestion.

Le réseau Natura 2000 : un outil pour conserver et restaurer la biodiversité à l’échelle européenne

Mis en place en application de la directive européenne « habitats » de 1992, le réseau Natura 2000 est composé de sites naturels désignés par les États membres et la commission européenne. L’objectif de ce réseau écologique européen est de stopper la dégradation des habitats naturels et les menaces qui pèsent sur les espèces de faune et de flore sauvage d’intérêt communautaire. Les Etats membres sont tenus de mettre en œuvre les mesures nécessaires à la conservation de la biodiversité qui a justifié la désignation des sites. En France, ces mesures sont identifiées et mises en œuvre par les gestionnaires des sites (dans la majorité des cas des collectivités locales) à travers des plans de gestion établis en lien avec les acteurs intéressés. Le financement des mesures de restauration est assuré en majeure partie par l’Union Européenne. Les responsables des plans, programmes, projets et interventions susceptibles d’affecter les objectifs de conservation spécifiques des sites sont tenus de produire des évaluations environnementales, qui peuvent, s’il apparaît qu’ils remettent en cause lesdits objectifs, compromettre l’obtention des autorisations nécessaires. 

La lutte contre les Dégradations et le grignotage des sites natura 2000 est difficile

Dépôts sauvages de déchets, circulation hors-pistes en 4×4, motocross ou quad, remblaiements et terrassements, destruction de haies et de ripisylves, etc… les pressions sur les sites Natura 2000 font l’objet de signalements citoyens récurrents sur la plateforme « Sentinelles de la nature ». A cela s’ajoutent les projets d’urbanisme ou d’aménagement d’infrastructures (notamment d’énergies renouvelables), pour lesquelles l’évaluation des incidences sur les objectifs de conservation des sites est souvent insuffisante, lorsqu’elle existe.

Le projet Sentinelles de la nature permet d’analyser les atteintes à l’environnement constatées sur le territoire par les citoyens. Ces trois dernières années, 121 signalements d’atteintes à l’environnement (soit 20 % des signalements) concernent des espaces naturels classés Natura 2000. La majorité de ces signalements concerne des dépôts de déchets (près de 70 %), le reste étant lié à des interventions humaines dans le milieu naturel, à l’aménagement d’infrastructures ou à l’urbanisation. Ce constat est alarmant car les sites Natura 2000 sont désignés pour leur intérêt écologique et la fragilité de la biodiversité qu’ils abritent. Les autorités responsables de la conservation du réseau Natura 2000 doivent prendre conscience de la nécessité d’agir pour tenter de limiter les atteintes à l’environnement et trouver des solutions à chacune d’entre elles.

Benoît SEGALA

membre du comité de pilotage « Sentinelles de la nature » à FNE LR

Face à ces nombreuses pressions notre fédération constate le manque de moyens de la police de l’environnement et des services de l’État pour assurer la conservation des sites Natura 2000. Nous constatons aussi trop d’arbitrages des préfets en faveur d’activités socio-économiques, au détriment de la conservation de la biodiversité, dans ces sites particulièrement sensibles. Enfin, la transmission récente de la gestion des sites Natura 2000 terrestres de l’État à la collectivité régionale nous interroge. Il faut absolument éviter que ce transfert soit l’occasion de diminuer encore les moyens d’animation des sites Natura 2000, ou d’affaiblir encore leur niveau de protection, au gré des sensibilités politiques locales.

Simon Popy

président de FNE Languedoc-Roussillon

Contacts presse :

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Quelques exemples d’atteintes signalées dans les sites natura 2000

Dépôt sauvage de déchet [N°8337]

Dépôt de déchets au sein du site Natura 2000 « FR9112027 – Corbières occidentales » désigné zone de protection spéciale au titre de la directive « Oiseaux » – commune de Fontcouverte dans le département de l’Aude.

FNE LR a signalé ces faits aux autorités compétentes.

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Aménagement pour la pratique des loisirs motorisés (4×4, quad et motocross) [N°16223]

Utilisation d’un terrain pour la pratique de sports motorisés à des fins commerciales. En juillet 2021, l’exploitant a sollicité un permis d’aménager pour régulariser son activité. Ce dernier a été refusé. Durant l’été 2022, diverses manifestations ont continué à être organisées sur ce site illégal et en dépit du risque incendie.

Une partie du terrain exploité concerne le site Natura 2000 « FR9112033 – Garrigues de Lussan » désigné zone spéciale de conservation au titre de la directive « Habitats » – commune de Verfeuil, dans le département du Gard.

FNE LR a signalé ces faits aux autorités compétentes.

Lien vers le signalement

Série de remblais sur le Causse d’Aumelas [n°12520]

Plusieurs remblais dans le secteur du Causse d’Aumelas. Ces dépôts de matériaux proviendraient des travaux d’aménagement de la ZAC de Pignan et de Montarnaud. Ils ont abouti à la destruction d’habitats d’intérêt communautaire (Garrigues à Chênes Kermès et Parcours substeppiques), sur plusieurs hectares.

Les zones remblayées concernent les sites Natura 2000  « FR9112037 – Garrigues de la Moure et d’Aumelas » désigné zone de protection spéciale au titre de la directive «Oiseaux» et « FR 9101393 – Montagne de la Mourre et Causse » d’Aumelas désigné zone spéciale de conservation au titre de la Directive « Habitats ».

FNE LR a signalé ces faits aux autorités compétentes.

Liens vers les signalements : ici, ici, ici et ici

Écobuages non maîtrisés dans le parc national des cévennes [N°17068]

L’écobuage est une pratique pastorale servant à entretenir les milieux ouverts. Autorisé mais encadré, l’écobuage est largement pratiqué, notamment en Lozère.

De décembre 2021 à janvier 2022, de nombreux écobuages mal maîtrisés ont été observés, notamment dans le parc national des Cévennes dans des zones classées N2000. Ces derniers ont conduits à la destruction de vielles forêts et de tourbières qui sont des milieux particulièrement importants pour la biodiversité. Les pompiers qui seraient intervenus six fois entre le 27 et 28 janvier suite à des écobuages non maîtrisés, selon un article du Midi libre.Selon un article de Reporterre, les écobuages mal maîtrisés sont dus à « une perte des savoir-faire », mais aussi à l’absence de mise en œuvre des mesures de précautions imposées.

Une partie des terrains brûlés concernent les sites « FR9110033 – Les Cévennes » désigné zone de protection spéciale au titre de la directive «Oiseaux» et « FR9101363 dit « Vallées du Tarn, du Tarnon et de la Mimente » désigné zone spéciale de conservation au titre de la Directive « Habitats »

FNE LR a saisi le procureur de Mende d’une plainte contre X.

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Non respect de la séquence éviter-réduire-compenser lors de travaux de curage de canaux [N° 20686]

L’ASA de Marsillargues a procédé durant l’automne 2021 à des travaux sur des canaux (curage), au cours desquels elle a détruit l’habitat d’une espèce de papillon protégé (Diane) et les habitats de nombreuses espèces d’oiseaux protégés (environ 450 arbres ont été coupés et plusieurs km linéaires de végétation ont été dégradés. En détruisant ces habitats, l’ASA a agit en parfaite contradiction avec les engagements qu’elle avait pris dans le cadre de l’évaluation d’incidences Natura 2000 qu’elle avait préalablement réalisée.

FNE LR demande la remise en état du site au titre de la réparation du préjudice écologique.

Les terrains impactés concernent les sites Natura 2000 « FR9112017 et FR9101408 – « Etang de Maugio » respectivement désignés zone de protection spéciale au titre de la directive «Oiseaux» et zone spéciale de conservation au titre de la Directive « Habitats »

Destruction en masse d’espèces protégées par un parc éolien [N° 6449]

31 éoliennes installées sur le Causse d’Aumelas provoquent chaque année depuis 12 ans la destruction d’espèces d’oiseaux et de chauves-souris protégés à fort enjeu de conservation (en particulier des Busards cendrés et des Faucons crécerellette en grand nombre). Il s’agit d’un des parcs éoliens qui cause le plus de destructions d’espèces protégées de France. Le 2 mars 2021, les exploitants ont été condamnés par la Cour d’appel de Versailles au motif que les destructions d’espèces protégées étaient illicites. Lire le communiqué de presse de FNE LR. Toutefois, les destructions continuent illégalement en dépit de cette décision judiciaire.

FNE LR a engagé plusieurs nouveaux contentieux pour faire stopper les destructions des oiseaux et chauves-souris.

Les éoliennes sont implantées dans les sites Natura 2000  « FR9112037 – Garrigues de la Moure et d’Aumelas » désigné zone de protection spéciale au titre de la directive «Oiseaux» et « FR 9101393 – Montagne de la Mourre et Causse » d’Aumelas désigné zone spéciale de conservation au titre de la Directive « Habitats ».

Lien vers le signalement.

Manifestation sportive dans le cirque de Navacelles [n° 6405]

Entre le 5 et le 10 juin 2017, les préfets du Gard et de l’Hérault ont autorisé une manifestation sportive de slackline dans le cirque de Navacelles. FNE LR et le COGARD ont contesté la légalité de cette manifestation devant le Tribunal administratif de Montpellier au motif qu’elle s’est déroulée en pleine période de reproduction d’oiseaux emblématiques menacés et extrêmement sensibles au dérangement. En septembre 2019, le Tribunal Administratif de Montpellier a déclaré illégal l’arrêté préfectoral qui avait autorisé, en 2017, cette manifestation sportive, au motif de son impact sur la nidification de l’Aigle royal.

Suite à l’organisation de cette manifestation en période de nidification de l’Aigle royal, la reproduction a échoué. Le 8 juin 2021, le tribunal administratif a également condamné le Préfet à réparer le préjudice moral de FNE LR (5 000 euros) du fait de cette autorisation illégale. Le communiqué de presse de FNE LR

La manifestation de slackline s’est tenue au sein du site Natura 2000 « FR9112011 – Gorges de la Vis et cirque de Navacelles » désigné zone de protection spéciale au titre de la directive «Oiseaux»

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répartition géographique des 121 atteintes publiées en sites Natura 2000